Lettre ouverte au Ministère de l’Agriculture

, par  FFAP

Lettre ouverte de la FFAP à Stéphane Le Foll, Ministre de l’agriculture

Au cours de l’hiver 2013/2014, les apiculteurs pyrénéens ont subi de très lourdes pertes : mortalités massives de colonies (+ 5000) et affaiblissement important des ruches rescapées.

Les ruchers touchés se trouvant dans des zones d’élevage et loin de toute zone de cultures, les apiculteurs dénoncent les traitements effectués sur les bêtes (endectocides, insecticides) et dans les bâtiments d’élevage.

Le 26 février dernier, vous avez mandaté une mission qui s’est rendue en Ariège auprès des apiculteurs sinistrés. A la suite de cette rencontre, l’état s’est engagé à apporter une aide rapide à ces apiculteurs.

Déni, aveuglement ou mépris ?

Ce n’est que 4 mois plus tard (début juillet), que vos services ont annoncé des mesures d’aide qui sont sans commune mesure avec l’ampleur de la catastrophe vécue par nos collègues.

  • Prêt à taux zéro pour la reconstitution des trésoreries : les conditions d’accès sont telles que bien peu d’exploitations seront éligibles, notamment les plus jeunes d’entre elles.
  • Subvention à l’achat d’essaims (dispositif inscrit dans le programme apicole européen), possible jusqu’au 15 juillet 2014 et à condition que les pertes soient supérieures à 50 %.
  • Outre le délai très court pour constituer un dossier et les conditions d’accès très restrictives :

 des essaims achetés début juillet ne seraient en capacité de produire qu’en 2015, s’ils passent l’hiver !

 développer des essaims à cette période, les préparer à l’hivernage a un coût non négligeable.

 L’aide à l’achat d’essaims s’élève à 30 € HT, or en moyenne un essaim coûte 130 € HT.

Comment financer le solde quand on n’a pas de trésorerie ? Comment financer leur développement ? par l’emprunt ?

Belle perspective ! Emprunter pour acheter des essaims, emprunter pour assurer le fonctionnement de l’exploitation, sans parler de dégager un revenu...

Même avec des prêts à taux zéro, et s’ils sont accordés, comment rembourser quand on a perdu une grande partie de ses moyens de production ?

Plus de stock, un cheptel amoindri et toujours des mortalités, une production 2014 amputée, une trésorerie engloutie : qui peut imaginer que de telles "aides" permettront aux apiculteurs de vivre et travailler jusqu’aux récoltes de 2015 ?

Sans compter que si les pratiques des éleveurs ne changent pas radicalement, il n’y a aucune raison que l’hécatombe ne se reproduise pas.

La légèreté de ces annonces relève du mépris pour le préjudice tant économique que moral subi par nos collègues !

Encore une fois, la destruction des abeilles et de l’apiculture est reléguée au rang de dommage collatéral inévitable, sans plus de remise en question !

La seule aide conséquente et juste est l’indemnisation complète des pertes...

Il faut pour cela que les “autorités” reconnaissent qu’il y a bien eu intoxication, et que ce faisant, elles acceptent de reconnaître leur responsabilité dans la mesure où c’est bien l’état qui délivre des Autorisations de Mise en Marché à des produits très toxiques pour l’abeille sans que ce risque soit évalué et pris en compte.

L’état fait des choix en matière de politique agricole, il doit en assumer les conséquences !

Aussi, nous, membres de la Fédération Française des Apiculteurs Professionnels, apiculteurs et citoyens, vous demandons instamment :

  • de rendre justice aux apiculteurs sinistrés en leur accordant une réelle indemnisation de leurs pertes
  • de consacrer tous les moyens nécessaires à la compréhension du phénomène d’intoxication qui a laminé l’apiculture pyrénéenne
  • de rompre radicalement avec un modèle agricole qui se déploie au détriment des abeilles, de l’apiculture et de l’environnement

Yvan Gouttequillet, porte parole de la FFAP

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